Même le meilleur des séjours ne saurait être parfait. Et malgré la passion que nous avons pour ce pays, il faut admettre que quelques désagréments (voire de vrais coups-de-gueule) ont émaillé notre périple thaïlandais. Incontestablement, pendant les dix années qui ont entrecoupées nos deux séjours, le pays s’est développé et le niveau de vie de la population s’est clairement amélioré. Est-ce cela qui a rendu les Thaïs moins serviles sympathiques que par le passé selon certains touristes ? Rien n’est moins sûr. Mais si la situation a clairement évolué notamment sous l’influence considérable du tourisme, elle a mis en relief quelques zones d’ombre. Revue de détail à la façon festival de Cannes Gérards du cinéma.
Si les routes sont en bon état et le niveau de vie suffisamment élevé pour permettre à de nombreux Thaïs de se déplacer autrement qu’à pied ou en bus, le corollaire immédiat en est que vous n’êtes jamais seul sur la chaussée. Aux heures de pointe, parcourir les quelques (5?) kilomètres qui séparent le quartier moderne de Sukhumvit du Palais royal, au bord du Chao Praya, vous prendra quarante minutes au minimum. Que dire si vous devez les parcourir en tuk-tuk, derrière un bus ? Le second corollaire à l’intensité du trafic est bien entendu que Bangkok est une des capitales les plus polluées d’Asie. Certaines photos en disent plus qu’un long discours …
S’il est moment où vous pouvez juger des effets néfastes du tourisme sur le pays, c’est sans doute lorsque vous décidez de prendre un tuk-tuk. Il faut avoir barouder un peu en Asie pour comprendre ce qu’est la mafia des Tuk Tuk. La petite chose jaune ou verte se retrouve en effet aux abord de tous les points d’entrée et de sortie des touristes : ports, gares, temples etc…
A Bangkok c’est carrément devenu une attraction, à la limite du manège folklorique. En conséquence de quoi, au moment de négocier avant de grimper dedans, le chauffeur vous annonce un tarif de science-fiction, avoisinant le quadruple du tarif d’un Uber (d’ailleurs souvent plus cher que le taxi au compteur). Et lorsque vous tentez de négociez, le chauffeur vous abandonne sans plus de façons pour tenter sa chance (ou pas) plus loin sur le trottoir. Les taxis en maraude adoptent souvent une attitude similaire, sûrs de trouver tôt ou tard des clients moins « radins ». Peut-être est-cela qui fait dire à certains que les Thaïs sont devenus hautains ?
Tout le monde le sait, nous le savions : la Thaïlande est une destination phare du tourisme sexuel. Rien de réjouissant, mais on peut toujours se dire a priori que ça s’est amélioré, qu’en évitant les « quartiers chauds », ça ne se remarque pas. Nous nous rappelions néanmoins les deux très jeunes filles accompagnant deux vieux et très gros messieurs occidentaux lors de notre check-out à Bangkok dix ans plus tôt, qu’allions-nous trouver une décennie plus tard ?
La situation a changé en effet, mais, contre toute attente, pas vraiment en mieux. Beaucoup de vieux messieurs seuls à la terrasse de bars ou de restaurants proches de lieux que, dans un langage un peu désuet, on serait tenté de nommer des « bars à entraineuses ». Mais aussi attablés ou déambulant bras dessus bras dessous de plus jeunes messieurs de toutes nationalités avec des (parfois très) jeunes filles. Jusque dans la chambre jouxtant la nôtre à l’hôtel, dans la cependant peu touristique cité de Kamphang Phet, où pendant le week-end, toute la famille (trois générations au minimum) vient manger aux frais du « généreux mécène ».
L’horreur atteint son paroxysme à Chiang Mai, ville « authentique » si l’on en croit certains blogs de voyageurs sans doute sous l’effet de psychotropes locaux ou exotiques. La rue que nous empruntons lors de notre première soirée, à la recherche d’un restaurant, est la synthèse improbable de la Babylone de l’ancien testament et de Pigalle, la nuit. Les campagnes d’affichage et les spots publicitaires contre l’exploitation sexuelle, aperçus notamment à l’aéroport, apparaissent quelque peu dérisoires devant l’ampleur du phénomène. Certes, le phénomène n’est pas cantonné à la seule Thaïlande, mais c’est assurément à Chiang Mai qu’il nous aura le plus choqué par son ampleur comme par sa banalité.
L’un des attraits de la Thaïlande est évidemment qu’elle offre de nombreuses et belles plages, ourlées d’une mer turquoise et parsemées de palmiers ou cocotiers. Cette médaille a néanmoins un revers. Ou plutôt deux, puisque tout(e) candidat(e) à la baignade se retrouve confronté(e) à ce dilemme paradoxal : s’immerger en toute solitude sur un rivage envahi de déchets en tous genres ou s’agglutiner en compagnie de ses congénères sur les bouts (nettoyés) de plage privée faisant face à chaque bar, hôtel ou restaurant.
Sans espérer disposer d’une côte immaculée pour nous tous seuls, nous espérions tout de même un peu plus de poésie et de quiétude en foulant le sable fin loin des excès des côtes méditerranéennes. Transats à louer, techno, plastiques divers, mégots et canettes : à n’en pas douter, d’autres explorateurs ont découvert Koh Samui avant nous. Dommage que le tourisme de masse ait à peu près le même visage sur tous les rivages du monde.
C’est peut être à Bangkok que nous aurons le mieux pris la mesure des changements intervenus entre 2008 et 2018 Passons sur la mort du roi et le début de règne houleux de son fils, pasons surtout sur la politique intérieure avec le retour aux affaires du parti « aristocratique » après l’exil du premier ministre, l’incarcération, quelques années plus tard, de sa sœur après avoir exercé les mêmes fonctions, la montée d’un intégrisme bouddhiste et de nombreuses manifestations réprimées… C’est au Wat Phrah Kaew – le temple de l’ancien palais royal et qui héberge le célèbre bouddha d’émeraude – que se mesure le temps écoulé.
En 2008, et bien qu’environnés par une importante partie de la population alors venue célébrer l’anniversaire de la sœur du roi, nous avions pu librement évoluer dans l’enceinte du temple, en jupe / short et tee-shirt à manches très courtes, profitant ainsi pendant plusieurs heures des fresques du Ramakien (la version thaïe du Ramayana indien) dans la galerie du temple. En 2018, nous nous faisons refouler une première fois car nos vêtements sont trop « courts », en haut comme en bas, pour pouvoir pénétrer décemment dans l’enceinte royale. Pantalons longs, tee-shirt à manche , chaussures couvertes, la liste des interdits est longue et semble être aussi parfois à la tête du client….. Notre seconde tentative sera la bonne, du moins le pensions-nous. Car, après avoir acquitté 1000 bahts (soit 25 €) par adulte, nous nous retrouvons cernés par une foule dense de touristes qui doit péniblement se frayer un chemin entre les bâtiments – d’un intérêt plutôt limité – du Palais royal jusqu’à l’entrée du temple. Et là, horreur, le chemin est balisé façon piste de Super G : c’est étroit, truffé de virages et pas possible de s’en écarter alors que d’immenses surfaces sont rendues inaccessibles à la foule qui nous traîne et nous entraîne.
Nous sommes condamnés à traverser l’espace par vagues successives. Prochain arrêt : la même photo pour tout le monde. Comble de la déception, notre sentier d’infortune se moque éperdument des fresques de la galerie, dont rien d’ailleurs n’indique où commence et où finit l’histoire épique qu’elles content.
De tout cela, et malgré une réelle affection pour ce pays si riche, si divers et passionnant, il reste un goût un peu amer de massification industrielle du tourisme. Est-ce vraiment inévitable dans tous les beaux pays du monde ? Si ce que nous aimons de ce pays n’est pas tout entier contenu dans ce second séjour, la Thaïlande reste un pays superbe, offrant de nombreux paysages différents et facile à parcourir et à découvrir…
Bravo pour votre superbe blog! On adore et encore plus les articles « worst of » une super bonne idée!
Belle suite de voyage
La familydreamtime
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Merci beaucoup 🙂 On s’amuse beaucoup à faire les worst of aussi…
Elena & co
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