Nous avons adoré notre séjour au Cambodge. C’est peut-être ce qui rend les points négatifs plus nets et plus vifs dans notre mémoire. Avant de commencer cette liste (non exhaustive) mais toutefois assez courte de ce que nous n’avons pas aimé au Cambodge, il convient de faire un point trafic routier. Comme dans tous les pays d’Asie, la conduite est … aléatoire. Ici comme au Népal, nous avons été de plus largement confronté à la toute puissance du deux roues. Et le deux roues à deux caractéristiques : il se déplace en meute et ne sait pas conduire. Les feux, les lignes au sol ou les trottoirs ne signifient absolument rien pour lui. Mais notre Worst of Vietnam parle déjà longuement du deux roues aussi nous n’en dirons pas plus pour l’heure…. Revenons donc sur notre aventure cambodgienne, d’autant plus que l’aventure n’a pas très bien commencé…
Nous avions opté pour une solution se présentant sous les dehors de la simplicité et de la facilité : prendre un bus « direct » de Bangkok à Siem Reap. Bien entendu, il restait toutefois à franchir à pied la frontière (sortie de Thaïlande et entrée au Cambodge), mais dans la situation présente, le même bus devait nous transporter d’un bout à l’autre.
Alors passons que nous ayons dû nous lever à 6h du matin (après une nuit presque blanche rapport au concert de hard rock thaï à côté) pour prendre une voiture nous amenant d’Ayutthaya à Bangkok avant le départ d’un bus, annoncé par mail pour 8h, qui finalement partira pour Siem Reap vers 9h15. Passons également sur le fait que le voyage, supposé durer 6h, durera plus de 8h. La « disparition » d’un des passagers – resté plus longtemps en Thaïlande que ne l’y autorisait son visa et, de son propre aveu, dépourvu d’argent, au moment de passer la frontière – y était sans doute pour quelque chose.
Bref, c’est après l’heure du thé que nous arrivâmes à Siem Reap où un agent de la compagnie de bus nous annonce qu’un tuk-tuk va nous conduire gratuitement à nos hôtels. Nous pressons le pas et sautons dans le susdit tuk-tuk dont le chauffeur se lance incontinent dans une boniment commercial pour nous inciter à nous adjoindre ses éminents services dans les jours à venir. Fatigué, agacé par le voyage chaotique et impatient de gagner notre hôtel, je l’interromps (sèchement ?). Ce fut une erreur. Finalement partis, nous sommes interloqués quand, arrivés en centre ville cinq minutes plus tard, le tuk-tuk s’arrête pour nous dire que la course jusqu’à l’hôtel nous coûtera 10 $. Pour résumer l’engueulade sérieuse qui s’en suivit : la compagnie ne dédommage pas les tuk-tuk pour qui la course « gratuite » est l’occasion ou jamais de placer une excursion payante dans les jours qui suivent. En coupant son petit speech, j’avais empêché le chauffeur de gagner sa vie. Cela nous le comprenons qu’après. Sur le coup l’attitude extrèmement agressive du chauffeur et la fatigue aidant, nous comprenons juste qu’on est en train de nous arnaquer et ça on aime pas. Encore un coup de la mafia des tuk tuk:-). C’est donc à pied et énervé que nous parcourons les quelques 2 km qui nous séparent de l’hôtel. Ce premier contact était quelque peu rude.
Cette mésaventure nous confrontait rapidement à la première nécessité qui s’impose à tout visiteur au Cambodge : se procurer des dollars. Car si le riel a bien cours, il sert quasi-exclusivement quand il s’agit de rendre la monnaie. Tout ou presque au Cambodge se paye en dollars. Et sans vouloir convoquer le souvenir de retentissantes crises ayant englouti des pays qui avaient fait le choix de s’en remettre à la monnaie américaine, il n’est certes pas nécessaire d’avoir reçu le prix Nobel d’économie pour comprendre que le recours massif au dollar dans un des pays les moins avancés du monde est tout sauf une bonne idée, car il favorise la hausse des prix, concentre la richesse et accroît la lourde dépendance du pays à l’égard du tourisme. Bref. Ici du coup, travailler avec ou pour les touristes apparaît comme un moyen simple et sûr de gagner de l’argent. Dans le même temps, les investissements semblent peu nombreux et principalement concentrés dans les grandes villes en vue de construire soit des immeubles de bureaux (surtout à Phnom Penh) soit des hôtels-casinos sur la côte. Manifestement, le pays est accoutumé, pour ne pas dire « accro », au tourisme et conserve le souvenir – et les habitudes – du tourisme haut de gamme qu’il a d’abord drainé.
L’un des effets directement sensibles pour les voyageurs en est que la vie est chère. Ou plutôt les hébergements et les restaurants sont souvent plus chers, à qualité équivalente, que dans les pays limitrophes. Et s’y ajoutent, sous couvert de « petites dépenses », les menus achats qui ponctuent le quotidien (course en tuk-tuk, nourriture, boissons) mais qui, mises bout-à-bout, pèsent lourd dans un budget de voyage limité. La situation atteint son paroxysme dans les îles du sud, où le cours de la pizza établit un plancher à 6$, le sandwich s’échange sur la plage à 4$ et l’oeuf du breakfast est introuvable à moins de 2$. Coup de grâce à Koh Rong Sanloem où notre cabane en bambou, certes mignonne mais on ne peut plus basique, nous coûtera 60$ par nuit (sans petit déjeuner). Il faut donc avoir le porte-monnaie bien accroché. D’autant plus que pour le niveau des tarifs pratiqués, le cadre qui vous est offert est loin d’être toujours enchanteur ou préservé.
Ici, la poubelle retourne le plus souvent à l’état sauvage. Même si nous avons plusieurs fois croisé à Phnom Penh un camion-benne à l’oeuvre, c’est à Sisyphe qu’il ferait penser tant ce qu’il fait paraît condamné à l’inutilité quelques instants plus tard. Les rues des villes et les plages sont souvent, obstinément, sales, jonchées de détritus alimentaires, de déchets plastique, de lambeaux de carton, de débris en polystyrène et de restes métalliques non-identifiés. Le phénomène n’est pas nouveau pour nous, mais suffisamment intense et sensible au Cambodge pour que nous le remarquions et qu’il nous rappelle plusieurs expériences indiennes. Il en est ainsi à Phnom Penh, Kratie, Sihanoukville, Koh Rong Sanloem, Koh Ta Kiev, Ban Lung. Seule Siemp Reap semble quelque peu échapper à cette règle. Une concession faite aux touristes ?
Il faut dire qu’en matière de propreté, la tâche est réellement titanesque : les poubelles publiques restent à inventer, ; le nettoyage des plages est laissé à l’initiative des restaurateurs et des hôteliers ; les habitudes de consommation font la part belle à tous les dérivés d’hydrocarbures, solides ou liquides, depuis les sacs plastique jusqu’aux bouteilles de mélange « deux-temps » vendues à tous les coins de rue à l’intention des omniprésents scooters. Tout finit jeté ou laissé à même le sol. Et, de temps en temps, quelqu’un y met le feu pour faire place nette. Il y a là quelque chose de désespérant.
Heureusement, le Cambodge, ça n’est pas que ça.